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Pourquoi les entreprises françaises doivent-elles mieux exploiter leurs données ? (vidéo)

Dans cette toute première session LinkedIn Live de Splunk en français, j’accueille deux invités prestigieux. Mon premier invité est Chief digital et social media officer chez Choyou, il est aussi influenceur dans le secteur des nouvelles technologies et fait partie du top 10 des influenceurs du CES de Las Vegas depuis plus de 4 ans. Dans une autre vie, il a également occupé les fonctions de social media manager et de product owner au DX Lab de BNP Paribas. J’ai nommé Jean-Baptiste Lefevre.

Mon deuxième invité, vous le connaissez bien, il s’appelle Laurent Martini, et il est vice-président Europe du Sud et marchés émergents chez Splunk. Actuellement en charge de 220 Splunkers, Laurent a été directeur général France pour Pure Storage entre 2016 et 2020, période durant laquelle le chiffre d’affaires de l’entreprise est passé de 5 à 54 millions de dollars. Fan de technologies, mais pas que, Laurent aime aussi faire du vélo, du ski et voyager sur son temps libre.

Aujourd’hui, nous allons vous parler de la data. Les données sont plus accessibles que jamais, mais elles restent encore trop peu et trop mal exploitées. C’est en tout cas ce que révèlent les recherches que nous avons menées auprès de 107 chefs d’entreprise et DSI français (et 1 250 à travers le monde) en partenariat avec les chercheurs de l’ESG. Les résultats nous ont permis de mieux comprendre comment les organisations les plus innovantes avaient fait des données le véritable moteur de leur réussite. Nous avons analysé et compilé toutes ces infos pour vous aider à accélérer et à optimiser votre transformation numérique dans un rapport qui s’appelle l’État de l’innovation pilotée par les données

Le constat est simple : les entreprises françaises doivent mieux exploiter les données

Ce rapport montre qu’environ 50 % des entreprises ont à peine entamé leur parcours de transformation numérique pilotée par les données. Pour poser le problème autrement, pourquoi certaines entreprises françaises sont-elles encore à la traîne, Jean Baptiste ?

Jean-Baptiste. Comme on l’a constaté lors du premier confinement, de nombreuses entreprises n’étaient pas prêtes à faire face, car elles ne disposaient pas des outils nécessaires pour travailler à distance. Il en va de même pour l’innovation pilotée par la data. De manière générale, les données sont bien collectées, mais l’écueil survient au moment de les structurer, c’est-à-dire de les trier et de les raffiner.

Et est-ce qu’il s’agit d’une spécificité française ?

Jean-Baptiste. Oui, et c’est d’ailleurs ce que souligne votre rapport. Beaucoup d’entreprises françaises collectent des données, mais peu les structurent de manière à pouvoir les exploiter pour des applications comme l’intelligence artificielle.

C’est un constat qu’on peut expliquer de diverses manières. Pour commencer, la réglementation est différente, mais le marché fait aussi face à un manque de disponibilité des compétences liées à la data.

Ce problème de structuration peut aussi être lié au fait que seulement 23 % des entreprises françaises interrogées disposent d’un système de classification intégrant l’ensemble ou la majorité de leurs données et que, bien souvent, elles ne connaissent même pas la qualité de ces données. Laurent, est-ce que vous auriez des conseils pour les entreprises qui souhaitent donner un coup de boost à l’exploitation de la data ?

Laurent. Le premier challenge consiste à prendre conscience de l’importance de la data. Aujourd’hui, de nombreuses entreprises se concentrent sur leur cœur de métier, mais elles ne se rendent absolument pas compte de la valeur des informations qu’elles collectent à longueur de journée par le biais de leurs applications. C’est une première impulsion essentielle, qui devrait être encouragée par la direction.

La deuxième étape concerne les compétences dont parlait Jean Baptiste. Il est nécessaire de créer une équipe autour de la data, souvent pilotée par une nouvelle fonction qu’on appelle Chief Data Officer. Une fois en place, elle doit absolument faire l’inventaire des données disponibles. Je suis souvent stupéfait de constater qu’un grand nombre de DSI continue d’ignorer 80 % de leurs données, même dans les grandes entreprises.

La classification vient après. Et pour être efficace, elle devrait rester simple. Il s’agit avant tout de hiérarchiser la valeur des données disponibles et de faire le ménage, ce qui peut déjà générer des bénéfices.

Il faut donc commencer par répertorier et classifier les informations. Mais d’après vous, quelles données permettent réellement aux leaders de prendre les bonnes décisions, et aux entreprises d’être à la pointe de l’innovation ?

Laurent. Je ne suis peut-être pas le mieux placé pour donner des conseils aux chefs d’entreprises, mais je dirais qu’il faut d’abord comprendre les données de son marché. Au cours des dix dernières années, on constate en effet que certaines organisations qui se croyaient hégémoniques ont complètement perdu pied par manque d’anticipation des changements.

Les entreprises doivent ensuite analyser les données relatives à leur activité. Aujourd’hui, la plupart d’entre elles naviguent à vue, alors qu’elles disposent d’informations détaillées sur l’évolution des ventes par rapport à la concurrence, le taux de satisfaction des clients ou le niveau de retour SAV des produits via leurs applications. Avec l’aide de l’intelligence artificielle, elles ont donc à portée de main presque tout ce dont elles ont besoin pour prévoir l’avenir, anticiper les évolutions du marché et assurer leur position sur le long terme.

Cette vision unifiée des données est particulièrement intéressante. Dans ce même rapport, 36 % des entreprises seulement sont capables d’agréger la data pour casser les silos interservices (contre 55 % en Allemagne). À votre avis Jean-Baptiste, la data doit-elle davantage être l’affaire de tous ?

Jean-Baptiste. Oui, je pense qu’il faut mettre la donnée au cœur du système. Dans un monde où chacune de nos actions et de nos interactions génère des données, il devient urgent que chaque entreprise se dote des méthodes, des outils et des équipes qui leur permettront d’optimiser l’utilisation de ces données. Il faut cesser de considérer ces ressources comme des charges, mais plutôt les envisager comme des investissements stratégiques essentiels, et les organisations qui s’y refusent font peser un risque réel sur la continuité de leur activité.

Plus inquiétant encore, près de la moitié des participants affirment que peu ou seule une minorité de leurs collaborateurs possèdent les outils et les compétences nécessaires pour exploiter correctement les données dont ils ont besoin. Laurent, quelles mesures les entreprises peuvent-elles prendre pour faire face à ce problème ?

Laurent. Comme je l’ai déjà mentionné, l’impulsion doit venir de la direction. Un employeur ne peut pas attendre que cette prise de conscience vienne de ses équipes. Il faut ensuite sensibiliser et former tous les collaborateurs. Il est en effet essentiel qu’ils comprennent en quoi les données sont si importantes pour l’entreprise et qu’ils apprennent à utiliser de manière optimale les outils mis à leur disposition. Et pour faire accepter cette idée, il faut aussi savoir récompenser les employés qui enrichissent régulièrement ces actifs.

Jean-Baptiste, faudrait-il mettre en place des formations à la data et si oui, qui faudrait-il former ?

Jean-Baptiste. Il existe des formations de grande qualité en France, mais la quantité fait défaut. J’ai lu récemment qu’il manquait environ 250 000 experts en data science en France pour satisfaire toutes les entreprises et les projets en cours. Il est donc nécessaire de parler davantage des métiers de data scientist, data analyst ou data engineer afin de les faire connaître à un public plus large, comme les lycéens en plein questionnement sur leur orientation professionnelle.

Il faut aussi proposer plus de formations au niveau de l’entreprise. Les métiers évoluent rapidement et les organisations ont tout intérêt à développer les compétences en interne.

C’est justement l’idée du nouveau podcast de Splunk Étant Données, qui met en valeur des Chief Data Officer en France, un métier à forte valeur ajoutée et en évolution.Mais soyons pragmatiques et parlons argent. Seuls 25 % des dirigeants français allouent plus de 15 % de leur budget IT aux solutions liées aux données, contre 37 % à l’échelle mondiale. Laurent, pourquoi une telle différence à votre avis ?

Laurent. D’après ce que j’observe, ce manque d’investissement sur l’IT et la digitalisation est effectivement typique de la France et, plus généralement, de l’Europe du Sud. De fait, ces pays considèrent encore souvent ces investissements comme une charge, alors que d’autres régions ont compris que ces ressources apportaient un véritable avantage concurrentiel.

Par exemple, si l’on regarde la capitalisation boursière des sociétés du secteur automobile, on remarque qu’en dix ans un acteur européen majeur comme Volkswagen s’est complètement laissé dépasser par Tesla, dont la valeur est près de 15 fois supérieure. Aujourd’hui, cette entreprise pourrait racheter presque tous ses concurrents, et on sait à quel point elle a investi dans l’informatique, l’intelligence artificielle et la data.

C’est bien dommage, car les DSI interrogés constatent que l’innovation pilotée par les données aide les entreprises à s’améliorer dans de nombreux domaines, comme la productivité des employés ou l’évolution de leurs produits et services. Jean-Baptiste, vous avez constaté ça aussi ?

Jean-Baptiste. Oui, c’est ce que j’ai vécu dans le secteur bancaire. C’est un domaine dans lequel la data et l’intelligence artificielle sont utilisées pour appuyer les conseillers et le back-office, avec des initiatives comme le RPA (automatisation robotisée des processus). Ce sont aussi des techniques utilisées par des entreprises comme Amazon ou Netflix pour faire des suggestions et améliorer les ventes.

Laurent. Netflix et Spotify sont de très bon exemple. Là encore, ce sont des entreprises qui ont complètement révolutionné leur secteur d’activité en moins de dix ans. Cela montre bien que les leaders de marché doivent se mettre à jour en matière de données et de technologies s’ils ne veulent pas risquer de disparaître.

Jean-Baptiste. Tout à fait. Spotify a d’ailleurs anéanti iTunes, qui a fermé son catalogue. Dans certains pays qui le permettent, il sera même bientôt possible de se voir proposer des recommandations musicales en fonction de ses origines ethniques, suite à une analyse ADN.

Justement, Jean-Baptiste, pour faire l’avocat du diable, trouvez-vous qu’il y a en ce moment une surenchère de technologies et de complexité autour de la data ?

Jean-Baptiste. Non, je ne pense pas. Comme l’expliquait Laurent, la crise a complètement rebattu les cartes. Dans ce contexte, on en parle peut-être beaucoup, mais il ne me semble pas qu’on en fasse trop.

J’ai lu dans un baromètre récent publié par l’Union européenne que la France était à la traîne par rapport à la moyenne européenne sur l’utilisation du cloud (21 % des entreprises l’utilisent contre 26 % en moyenne dans l’UE). Comment expliquer ce retard Jean-Baptiste ? Et quelles sont les réticences ?

Jean-Baptiste. L’écart entre la France et le reste l’Europe est certes une réalité, mais il ne s’agit pas non plus d’un gouffre. À mon avis, il s’explique principalement par la régulation de certains secteurs. Dans le domaine bancaire, par exemple, les infrastructures sont particulièrement vieillissantes. L’implémentation du cloud représente donc des coûts financiers très importants, et les investissements ne se font pas à la légère.

Le passage au cloud a tout de même commencé, mais il y a effectivement des réticences lorsqu’il s’agit de migrer des activités principales ou back-office. Il faut aussi prendre en compte les questions de souveraineté des données auxquelles doivent faire face certaines entreprises et institutions.

Pour parler un peu d’actu, la COP26 a récemment réaffirmé le besoin de limiter la hausse des températures à 1,5 degré d’ici la fin du siècle. Splunk a aussi annoncé ses propres engagements la semaine dernière, en promettant d’être neutre en carbone d’ici 2050. Laurent, comment peut-on mettre les données au service de la lutte contre le changement climatique ?

Laurent. Les données ne sont en effet pas neutres en matière d’émissions carbone et les data centers consomment beaucoup d’énergie. Mais comme je l’ai dit précédemment, les entreprises doivent commencer par faire le tri dans leurs données et se débarrasser de celles qui n’ont aucune utilité. Nous permettons donc à nos clients de réduire leurs émissions en les aidant à faire le ménage, à devenir plus efficients et à mieux exploiter le potentiel de leurs données.

Splunk s’est également engagé à réduire son empreinte environnementale et à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.

Pour continuer dans l’actu, récemment, on a appris que la France avait lancé un plan de 2,2 milliards d’euros pour faire du pays « un champion » du secteur de l’IA. Vous en pensez quoi dans le cadre de l’exploitation des données Jean-Baptiste ?

Jean-Baptiste. C’est une excellente nouvelle ! Un plan comme celui-ci va permettre d’encourager l’innovation sans sacrifier la souveraineté technologique de la France, qui va pouvoir garder la main sur ses données. La bonne nouvelle, c’est aussi que la moitié de cet investissement concerne directement l’enseignement, la formation et l’attraction de nouveaux talents. Une grande partie devrait également être dédiée à l’accompagnement de plus de 500 PME et ETI dans l’adoption et l’usage de l’IA d’ici 2025, dans le but de transformer les succès scientifiques français en succès économiques.

Un dernier mot à ajouter avant de conclure ?

Laurent. Si je devais résumer en une phrase, je dirais que nous sommes là pour aider les entreprises françaises à prendre une longueur d’avance sur la concurrence, tout en contribuant à l’équilibre de la planète, en leur fournissant un contrôle total sur les informations à leur disposition.

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J’espère que vous avez apprécié cette session sur la data et la transformation numérique au moins autant que moi. Si vous êtes intéressé par l’un des sujets abordés lors de la session d’aujourd’hui, n’hésitez pas à consulter notre rapport sur l’état de l’innovation dans le domaine des données en cliquant sur ce lien.

À bientôt !

Audrey est senior content marketing manager sur les marchés francophones. Elle est responsable de la création et la localisation en français de tout le contenu de Splunk, des réseaux sociaux au blog en passant par les réussites de nos clients ou les livres blancs. Avant Splunk, Audrey a entre autres travaillé chez VMware, Facebook, Neopost, Sanofi ou encore la SNCF. Passionnée par l’écriture, elle tient depuis des années un blog culture, Digression Urbaine.